Crédit Photo : AFP
Eluana avant son accident
-
Après dix ans de luttes judiciaires pour obtenir un "droit à mourir" pour leur fille, les parents de cette jeune femme dans le coma depuis 1992 sont sur le point de remporter le combat.
-
Eluana a été transférée dans une clinique dont le personnel a accepté de cesser de la maintenir artificiellement en vie. Mais le débat se fait plus vif à l'approche du dénouement possible de l'affaire.
- le 03/02/2009 - 17h27
Le combat de la famille d'Eluana Englaro est symbolique et agite depuis longtemps l'Italie, où plusieurs affaires similaires ont déjà posé de manière criante le débat sur la fin de vie et sur le droit à mourir. Le père d'Eluana, qui mène une bataille depuis 10 ans pour que sa fille, dans le coma depuis 17 ans à la suite d'un accident de la circulation, ne soit plus maintenue en vie artificiellement, assure, témoignages à l'appui, que la jeune fille n'aurait jamais accepté de continuer à vivre alimentée par une sonde.
L'affaire a déjà donné lieu à d'intenses batailles judiciaires qui se sont conclues devant le tribunal de Milan : le 21 janvier dernier, il a annulé un ordre administratif de la Lombardie interdisant à tout le personnel de santé de la région de suspendre l'alimentation d'Eluana. Un hôpital d'Udine dans la région de Vénétie-Frioul s'est depuis déclaré prêt à accueillir la jeune femme et une équipe médicale s'est constituée pour accéder dans un délai de quelques jours à la demande du père de la jeune femme de suspendre son alimentation pour la laisser mourir. Et une ambulance a transporté Eluana dans la nuit de lundi à mardi de la clinique de Lecco, près de Milan, où elle était maintenue jusqu'alors en état végétatif, à la clinique "la Quiete" (La tranquillité) d'Udine.
"Nous avons peut-être enfin réussi"
"C'est le premier pas (...) vers la libération de ma fille. Nous avons peut-être enfin réussi", a commenté Beppino Englaro. "Elle ne souffrira pas", a assuré pour sa part le Dr Defanti, qui fait partie de l'équipe de 15 médecins et infirmiers qui ont pris en charge Eluana. Elle devrait mourir dans un délai estimé à 15-20 jours. Mais si le combat des proches d'Eluana semble toucher à son terme, les réactions sont toujours aussi vives. Le ministre de la Santé du Vatican, le cardinal Javier Lozano Barragan, a ainsi réagi au transfert de la patiente en lançant un appel pour que soit "arrêté cet abominable assassinat". Dimanche déjà, le pape Benoît XVI avait apporté son soutien à l'Eglise italienne qui s'est opposée à de multiples reprises à l'arrêt de l'alimentation d'Eluana, le qualifiant "d'euthanasie inacceptable". Le pape a estimé que l'euthanasie était une "fausse solution au drame de la souffrance" et un acte "indigne de l'homme".
Le ministre de la Santé, Maurizio Sacconi, qui avait déjà adressé en décembre une mise en garde aux établissements qui accueilleraient Eluana pour la débrancher, agitant la menace de "conséquences inimaginables", a affirmé pour sa part mardi que le gouvernement "examinait la situation d'un point de vue formel", laissant présager une nouvelle intervention contre l'arrêt de l'alimentation de la jeune femme.
Plusieurs représentants de la droite et de formations politiques centristes et catholiques ont aussi appelé le gouvernement à intervenir. Maurizio Ronconi, de l'Union des démocrates-chrétiens, a plaidé pour que soit adopté en urgence "un décret qui sauve la vie d'Eluana". Le quotidien de l'Eglise italienne, Avvenire, a appelé à la mobilisation contre la mort d'Eluana, affirmant que l'Italie "ne restera pas à la fenêtre (à observer) cette insupportable agonie"